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28 novembre 2014 5 28 /11 /novembre /2014 13:57

Alors que Paris et Berlin célèbrent le cinquantenaire du Traité de l’Élysée et la réconciliation franco-allemande, le professeur Annie Lacroix-Riz, s’appuyant sur l’étude des archives diplomatiques, établit une toute autre version des faits. Selon ces documents, le rapprochement franco-allemand répond moins à une volonté de réconciliation après la Seconde Guerre mondiale, qu’à un projet ancien de collaboration des élites économiques et financières. En outre, ce rapprochement, parrainé par Washington, s’est effectué de manière à associer le capitalisme européen aux besoins du militarisme US.

Lien:http://www.voltairenet.org/article177220.html

 

 | 22 JANVIER 2013 

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German-foreign-policy.com : On dit que le Traité de l’Élysée a été important pour la réconciliation entre la France et l’Allemagne. Or, vous dites que la collaboration économique et politique franco-allemande qui est la base de cette réconciliation ne date pas de l’après-Deuxième Guerre mondiale mais de l’après-Première Guerre mondiale.

Annie Lacroix-Riz : La collaboration franco-allemande date de l’après-1918, mais aussi d’avant 1914. Cette politique d’Apaisement, née de la concentration, de la fusion et des alliances de capitaux (français, allemands, franco-allemands) a été amorcée avant 1914. Elle a provoqué des débats en France, où se sont affrontées deux lignes - la ligne dure Delcassé et la ligne de compromis Rouvier, soutenue par ceux qui proclamaient que les alliances des capitaux étaient un facteur d’entente et que finalement on pourrait peut-être faire l’économie de la guerre (ce qu’a cru Karl Kautsky, lui-même rallié avant 1914 à la thèse du « super-impérialisme » bannissant la guerre). La question qui s’est posée entre les deux guerres, s’était posée avant la Première Guerre mondiale - et s’est à nouveau posée après la Deuxième Guerre mondiale, avec l’intégration européenne.

german-foreign-policy.com : Est-ce qu’il y a un dénominateur commun ?

Annie Lacroix-Riz : L’Union Européenne a été symbolisée du point de vue franco-allemand par les relations entre les industries lourdes des deux pays, c’est à dire le minerai de fer lorrain contre le charbon de la Ruhr, qui évidemment ont tissé les relations après la défaite française de 1870. Elle est née des rapports entre l’industrie sidérurgique allemande et les grands sidérurgistes français. Les alliances de 1870 à 1914 qui se sont traduites par un débat sur la « réconciliation » éventuelle ont impliqué pour la France l’alternative entre l’expansion coloniale ou la « revanche » en Alsace-Moselle. À la fin du XIXe siècle, dans les relations interimpérialistes entre la France et l’Allemagne, les milieux dirigeants français ont pris l’habitude finalement de considérer que l’Allemagne était un facteur clé non seulement économique mais aussi politique. De ce dernier point de vue, 1870-1871 (de l’impréparation française à la guerre à l’appel à Bismarck pour écraser la Commune) a fixé le schéma de 1940. Au thème de l’expansion coloniale contre la « revanche » en Alsace-Moselle a succédé en 1938, entre Anschluss et conférence de Munich, celui du « repli impérial » français contre « les mains libres à l’Est » pour le Reich (l’impérialisme français renonçant à son influence extérieure).

german-foreign-policy.com : Et cela a continué ?

Annie Lacroix-Riz : Oui. Vous avez exactement la même chose après la Première Guerre mondiale. C’est un homme de la sidérurgie française, Raymond Poincaré, protégé des de Wendel (comme Robert Schuman après lui), qui a illustré à la fois la politique d’exécution de Versailles et, malgré les légendes, la politique de collaboration. C’est lui qui a capitulé en 1923 sur l’Allemagne, d’abord pour des raisons franco-allemandes, très peu après l’occupation de la Ruhr - avec la menace allemande de bloquer les accords chimiques secrets de 1919 avec l’IG (première mouture de l’IG Farben : Kuhlmann ne pouvait se passer de la mise en œuvre de ces accords). La forte pression allemande pour faire capituler l’industrie chimique française a été complétée par le chantage financier de Washington au retrait français de la Ruhr, efficace à la fin de 1923 : elle a amorcé le Plan Dawes (1924) et la liquidation des « réparations ». Cette configuration fut celle d’autres secteurs de l’industrie, dont la sidérurgie, et elle s’est maintenue. La collaboration franco-allemande, c’est à dire la tendance à la « réconciliation », a été une tendance permanente parce que le grand capital français s’est en dernière analyse interdit toute autonomie à l’égard du Reich depuis 1870.

german-foreign-policy.com : À la suite de l’occupation de la France par le Reich en 1940, la collaboration continua...

Annie Lacroix-Riz : Le grand capital français n’a pas collaboré parce qu’il a été vaincu, il a été vaincu, en s’y prêtant activement, parce qu’il avait choisi de collaborer sans réserves dans des conditions d’inégalité très profonde. La collaboration de 1940 à 1944 a été, comme la Défaite elle-même, une conséquence directe de la collaboration des années 1920-1940, dont j’ai montré les étapes dans l’ouvrage Le choix de la défaite. Il s’agit d’une coopération dans tous les domaines, commercial (cartels compris), financier, et politico-idéologique. Toutes les formes en ont existé après-guerre, mais surtout depuis 1925/1926, depuis la fameuse « réconciliation » officielle couronnant la fondation du cartel international de l’acier (septembre 1926). On a conclu des alliances des capitaux, alliances parfois fort étendues, souvent clandestines, surtout depuis 1933, en pays neutre, dont la Suisse. Mais l’acmé de la collaboration franco-allemande fut logiquement l’Occupation : elle accrut les chances des vastes plans industriels et financiers des Allemands, qui réservaient à leur partenaires la portion congrue (par exemple dans les marchés internationaux) : une maigre part que leurs partenaires avaient déjà acceptée avant-guerre, notamment via les cartels, sidérurgique, chimique, etc.

german-foreign-policy.com : Après la catastrophique Deuxième Guerre mondiale, est-ce qu’il y avait un changement de la politique de la France au regard de l’Allemagne ?

Annie Lacroix-Riz : La Deuxième Guerre mondiale a été catastrophique pour les peuples, mais elle n’a pas entraîné de changement politique dans une France marquée par le statu quo général après la Libération ; la politique de la capitulation française devant le modèle allemand fut même aggravée. Évincée de sa position de grande puissance par sa défaite ignominieuse de 1940, la France a ajouté à ses motifs propres d’apaisement avec l’Allemagne les concessions à la pression des États-Unis, pression beaucoup plus efficace qu’après la victoire française de 1918. Les motifs américains étaient les mêmes qu’en 1918 et dans l’entre-deux-guerres : le programme d’expansion de Roosevelt et de ses successeurs était le même que les 14 points de Wilson et de ses successeurs ; l’appui prioritaire sur l’Allemagne, pays le plus concentré et le plus lié aux États-Unis, pour constituer un énorme marché « européen », « porte ouverte » à leurs marchandises et à leurs capitaux, supposait en 1945 comme en 1918 une politique de reconstruction prioritaire de l’Allemagne : leur partenaire économique prioritaire, pivot de leurs investissements en Europe, ne pouvait pas payer de réparations aux rivaux français, anglais, et, en 1945, soviétiques, etc. Or, après 1945, le vrai vainqueur de la guerre était américain, pas français (on néglige ici l’URSS, vainqueur militaire incontestable, mais épuisé). 
Il y eut encore moins de « politique allemande » de la France, au sens de politique indépendante ou autonome. Depuis 1948 et la création de la « Trizone », sous la pression américaine, la France a abdiqué toute autonomie en Allemagne Occidentale : Washington lui a interdit de prélever toute réparation (dans l’usine BASF de Ludwigshafen où elle avait conserve tout le haut personnel hitlérien de l’IG Farben etc.). Tout a marché du même pas. Il n’y a jamais eu, malgré les proclamations, de « politique allemande », et c’est une des raisons du départ volontaire de Charles De Gaulle en janvier 1946, bien qu’il ait prétendu que la France avait des garanties « sur le Rhin ». De Gaulle a formellement résisté, il a souvent dit "non", mais quand vous regardez les dossiers économiques du Quai d’Orsay, vous vous rendez bien compte que la politique de la France, même sous sa gestion, était sans rapport avec ses proclamations : son pays, à l’intérieur de la sphère d’influence américaine, n’avait pas les moyens de les mettre en œuvre. 
Logiquement, les choses allèrent même, la France ayant été vaincue et non victorieuse, beaucoup plus vite qu’avant la Deuxième Guerre mondiale. Et ce, alors même que Washington avait un besoin impératif de Paris pour faire passer sa politique allemande. Rien ne l’illustre mieux que l’abdication militaire si peu de temps après une Occupation nettement plus ample, cruelle et coûteuse que de 1914 à 1918 : de fait, cinq ans après la fin de la guerre, officiellement neuf ans. Imagine-t-on la France abandonnant toutes les clauses économiques de Versailles en 1923 (c’est le sens de la CECA en 1950) et toutes ses clauses politico-militaires en 1927 (réarmement officiel d’octobre 1954 au traité de Paris – caution française indispensable). Et ce que j’ai dit pour septembre 1944-janvier 1946 vaut pour 1958-1969.

german-foreign-policy.com : Le résultat fut l’intégration européenne. Qu’est-ce qu’elle a signifié pour la France ?

Annie Lacroix-Riz : L’adhésion officielle à la politique soustrayant l’Allemagne (occidentale mais appelée à devenir l’Allemagne réunifiée) aux conséquences de sa défaite de 1945. L’intégration européenne fut comprise et analysée comme telle, malgré les grands discours sur « l’Europe » réconciliée.
 Le discours du 9 mai 1950 de Robert Schuman (homme-lige de Washington qui l’imposa comme son ministre des Affaires étrangères de 1948 à 1952) succéda à des années de pressions américaines, relayées par l’ambassadeur de France à Washington, Henri Bonnet (1945-1955, devenu à sa retraite administrateur de nombre de majors pétrolières, américaines comprises) : Bonnet n’avait cessé de prôner, à Bidault aussi (prédécesseur de Schuman) l’intégration de l’Allemagne occidentale au projet « européen » des États-Unis, la renonciation à toute résistance, etc. Le 9 mai 1950, quand Schuman lança sa Communauté européenne du charbon et de l’acier, célébrée par les « milieux bien informés » comme la résurrection du cartel international de l’acier de 1926, on annonça à la population que règnerait la paix générale, grâce aux « hommes des Marches », Schuman, Adenauer, Gasperi (dont on enjoliva considérablement le passé fasciste ou nazi), que le Comité des Forges et ses marchands de canons étaient vaincus, que l’industrie lourde deviendrait pacifique, etc.

Or, le 10 mai,

- 1. Schuman devait aller à la conférence de Londres pour une des premières reunions de l’OTAN (organisation militaire du Pacte atlantique signé en avril 1949), où Washington (avec le soutien britannique) lui poserait officiellement la question de la reconstitution stricto sensu de l’armée allemande : pour utiliser « les nombreuses générations bien aguerries de la Wehrmacht » avait expliqué Bonnet le 19 mars 1949. Le tapage sur la CECA permit de différer cette étape officielle du réarmement de la RFA.

- 2. fut clairement posée, notamment par des réunions des hauts fonctionnaires, sur les fermetures imminentes des mines françaises (et belges) condamnées par la concurrence de la Ruhr, la vraie question économique : celle d’une intégration européenne économique, avec division internationale du travail. On a pour convaincre la population usé des mêmes arguments qu’en septembre 1931, où Laval intronisa André François-Poncet, homme du Comité des Forges, comme ambassadeur à Berlin et créa officiellement la collaboration économique (qui n’avait pas attendu cette circonstance). C’est la même collaboration qu’avant la guerre. Et là, les choses sont allées encore plus vite.

german-foreign-policy.com : Pourquoi la France a-t-elle choisi l’intégration européenne ?

Annie Lacroix-Riz : C’est le grand capital qui règle le sort de la France comme le sort de tous les pays européens. La concentration de capital et l’élévation consécutive de la composition organique du capital qui en résulte ont pour conséquence la baisse du taux de profit. Le grand capital est donc conduit à une guerre des salaires permanente, prévue d’emblée par les hauts fonctionnaires : ceux-ci ont annoncé, dès mai 1950, le « dumping social » d’aujourd’hui (en utilisant l’expression même), c’est à dire la baisse permanente des salaires. Nous sommes parvenus au point qu’ils prévoyaient alors, avec une baisse particulièrement violente du « travail payé », seul moyen de maintenir voire (pour le capital le plus puissant) d’augmenter le profit. Les textes de 1950-1955 fournissent le descriptif exact de l’intégration européenne d’aujourd’hui et balaient la thèse d’une « dérive » récente qui aurait gâché le beau projet d’une « Europe sociale ». L’« Europe sociale » est conforme à ce qu’ils avaient annoncé, et si les populations ne réagissent pas, triomphera le programme affiché par un récent patron de Peugeot, clamant qu’il n’y a pas de limite à la baisse des prix de revient...

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La réconciliation franco-allemande et l’Europe sociale cachent une réalité plus prosaïque : l’association du capitalisme européen à la guerre permanente des Etats-Unis
©Présidence de la République

german-foreign-policy.com : Quel rôle a joué le Traité de l’Élysée dans ce développement ?

Annie Lacroix-Riz : Le Traité de l’Élysée, c’est surtout une étape politique ou idéologique dans cette intégration européenne, importante pour la légende de la « réconciliation », qui interdit entre autres l’accès de la population à la véritable histoire des relations franco-allemandes : un des sous-produits en a été le « manuel d’histoire européen » qui malmène l’histoire scientifique, mais auquel les manuels d’histoire français tendent à ressembler. La propagande qui suivi 1963 a permis de masquer aux peuples, français et allemand, la réalité et les conséquences de la reconstitution de la puissance allemande avec le soutien américain, tout comme après la Première Guerre mondiale. En fait de paix permanente, le capitalisme européen s’associe à la guerre permanente, dans une apparente alliance idyllique entre Europe et États-Unis. En réalité, la crise systémique qui dure depuis près de 40 ans nous ramène à la « crise générale de l’impérialisme » qui a, il y a un siècle, débouché sur la Première Guerre mondiale (et mis fin à la crise ouverte en 1873). La crise systémique suivante a débouché sur la Deuxième Guerre mondiale. La virulence de la phase actuelle de la crise actuelle nous ramène à cette histoire. On ne saurait trop conseiller à vos lecteurs de lire ou de relire une réédition de L’impérialisme, stade suprême du capitalisme de Lénine (1917), lecture propice à l’éveil sur les réalités. Sans parler de l’analyse de Marx du capital...

       
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27 novembre 2014 4 27 /11 /novembre /2014 19:26

Les marins russes qui travaillent avec le premier bâtiment de classe Mistral

Les marins russes qui se familiarisent avec le premier bâtiment de classe Mistral construit pour la Russie resteront en France tout au moins jusqu'au 1er janvier prochain, estime Arnaud Dubien, directeur du centre d'analyse de la Chambre de commerce et d'industrie France-Russie.

"Je crois savoir que l'équipage russe du Mistral restera à Saint-Nazaire jusqu'au 1er janvier. Si les choses se calmaient quelque temps dans le Donbass, ce qui ne serait pas surprenant avec l'arrivée de l'hiver russo-ukrainien, je pense que la France saisirait l'ouverture d'une fenêtre d'opportunité pour livrer le Vladivostok", a déclaré M. Dubien dans une interview au quotidien Le Point.

Selon l'expert, "les personnes proches du dossier laissent entendre en privé que ne pas livrer n'est pas vraiment une option, mais qu'il faut attendre un contexte plus propice".

© RIA Novosti. Grigory Sysoev

 

Mardi 25 novembre, le président français François Hollande a suspendu la livraison à la Russie du premier des deux bâtiments de projection et de commandement (BPC) de classe Mistral commandés à la France par Moscou. Le président de la République a motivé sa décision par le fait que la situation actuelle dans l'est de l'Ukraine ne permettait toujours pas la livraison du navire.

Selon le député européen et analyste politique français Aymeric Chauprade, une non-livraison des Mistral à la Russie aurait des conséquences graves pour la France et d'autres pays.

"Le problème revêt malheureusement le caractère politique et tire son origine des pressions émanant des Etats-Unis et de certains pays de l'Otan tels que la Pologne. L'Union européenne et les Etats-Unis exercent une forte pression sur la France pour l'amener à ne pas livrer les Mistral", a indiqué M.Chauprade dans une interview à la chaîne de télévision RT.

© RIA Novosti.

 

Selon l'analyste, cette pression a contraint François Hollande à surseoir à la livraison du premier BPC, ce qui risque de dégénérer en catastrophe économique pour la France.

Mais le plus grave serait la perte de la confiance dans la parole de la France, estime le député européen.

RIA NovostiLes marins russes qui travaillent avec le premier bâtiment de classe MistralL'équipage du premier Mistral russe fêtera le Nouvel An en France (expert)

21:09 27/11/2014 Les marins russes qui se familiarisent avec le premier bâtiment de classe Mistral construit pour la Russie resteront en France tout au moins jusqu'au 1er janvier prochain, estime Arnaud Dubien, directeur du centre d'analyse de la Chambre de commerce et d'industrie France-Russie.>>

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27 novembre 2014 4 27 /11 /novembre /2014 19:14

Plus de 20 ans ont passé depuis la dissolution du Pacte de Varsovie mais les forces d'occupation américaines sont toujours présentes en Europe. Ce paradoxe historique s'appuie sur une mythologie mêlant "la faiblesse de la démocratie en Europe de l'Est", "les régimes totalitaires" et "l'agression russe".

Bien sûr, la protection épique des frontières démocratiques et géographiques de l'Europe a été déléguée aux États-Unis "par les cieux et depuis la création du monde". Les intérêts des Américains sont transparents et cette mythologie voile en fait un nouveau type de néocolonialisme, vers lequel la bonne vieille Europe fonce tête baissée. Les mythes sont ce qu'ils sont - mais même un fusil accroché au mur peut tirer.

A la frontière russe

Si l'Europe occidentale a accepté depuis longtemps d'être la "propriété politique des USA", tout n'est pas aussi uniforme au sein de l'espace géopolitique à l'est de l'Allemagne. Les nouveaux membres de l'UE et de l'Otan, comme des enfants irresponsables, ont besoin d'une tutelle particulière. C'est pourquoi en avril 2014, sur fond de crise ukrainienne, 600 commandos américains ont été temporairement déployés dans les pays baltes et en Pologne.

En juillet, dans une conférence de presse pour les journalistes étrangers au département d’État américain, le général Frederick Hodges a déclaré: "La Russie, c'est parfaitement évident, se présente  comme un ennemi… Beaucoup de ceux qui observent ce pays ont compris que la Russie était restée la même, et ceux qui pensent qu'elle pourrait devenir pour nous un parfait partenaire comme tout autre pays européen se trompe manifestement… Quel que soit le gouvernement en Russie – impérial, communiste, postsoviétique ou poutinien – on retrouve l'usage de la force, leur propre interprétation de certaines règles des relations internationales, leur utilisation, les moyens pour parvenir à ses fins…".

Bref, la Russie ne convient pas parce qu'elle est la Russie, et les USA sont la dernière instance à détenir la vérité.

En septembre, les Américains ont projeté dans les pays baltes des armements lourds et des blindés. Puis le 23 novembre, le général Hodges, commandant suprême des forces alliées en Europe, a annoncé que les troupes américaines resteraient en Lituanie, en Estonie, en Lettonie et en Pologne "tant qu'il sera nécessaire de retenir l'agression russe".

Voilà avec quelle facilité les plans temporaires de Washington deviennent permanents, et les déclarations politiques s'avèrent être de simples décorations. D'ailleurs, en novembre, le général Hodges défendait également les valeurs européennes dans les montagnes du Caucase du Sud - il s'est rendu en Géorgie où sera bientôt installée une base d'entraînement de l'Otan.

Le 24 novembre, pendant une session de l'Assemblée parlementaire de l'Otan à la Haye, le chef de la délégation américaine Michael Turner a déclaré que les États-Unis soutenaient "entièrement la Géorgie": "Je pense que nos relations bilatérales et la coopération dans le cadre de l'Otan ont beaucoup d'importance. La Chambre des représentants du congrès américain a adopté une résolution pour accorder à la Géorgie un Plan d'action pour l'adhésion à l'Otan (MAP) et approfondir la coopération avec ce pays".

De toute évidence, la leçon de l'imposition de la paix en août 2008 n'a pas été retenue.

Contrairement à ses "partenaires" américains la Russie n'aspire pas à répondre symétriquement en créant des bases militaires au Canada et au Mexique pour renforcer sa sécurité. Mais ses ressources permettent tout de même à la Russie de se défendre avec efficacité, de se développer et de dominer le long du périmètre de sa frontière nationale.

Combattre le mal par le mal

La Russie réagira très probablement à la construction de nouvelles bases de l'Otan à proximité de ses frontières en sortant du traité sur l'interdiction des missiles à moyenne portée. Le temps d'arrivée des missiles jusqu'aux cibles d'Europe occidentale se réduirait alors jusqu'au dixième de seconde et le bouclier antimissile américain (ABM) serait inutile.

Les spécialistes pensent qu'une seule brigade de missiles Iskander en Crimée pourrait éliminer toute présence navale des USA en mer Noire. Le radar de prévention avancée d'attaques de missile à base de nouveaux modules Voronej-DM est déjà en service.

Le général espagnol Jesus Argumosa Pila, directeur du centre de recherches militaires et stratégiques Athena Group, compare avec inquiétude le potentiel militaire des USA et de la Russie: "Les forces américaines comptent 1,492 million d'hommes, la Russie 845 000. Les avions stratégiques capables d'embarquer l'armement nucléaire: USA – 154, Russie – 141. Les sous-marins nucléaires: USA – 140, Russie – 110. Les missiles dotés d'ogives nucléaires: USA – 450, Russie – 356. Les armes d'artillerie: USA – 7 429, Russie – 5 837". Mais le général souligne qu'il existe une parité nucléaire complexe entre les USA et la Russie, et qu'un conflit militaire entre les deux États est pratiquement impossible.

Si le conflit est impossible, les forces américaines en Europe sont un élément de mythologie, une décoration théâtrale, un otage de la situation, et tout sauf une force de réaction rapide aux menaces réelles.

Les bonnes idées s'invitent de plus en plus souvent dans les cerveaux européens. Et même quand Le Huffington Post s'interroge "Ukraine: la guerre totale avant la partition?", le Financial Times britannique lui répond froidement le jour même: "Rien de bon n'attend l'Ukraine à côté d'une Russie hostile… Toute armée combat à la limite de ses moyens, et pas comme elle le voudrait. Les dirigeants occidentaux entrés en confrontation avec la Russie devraient en tenir compte… D'un point de vue réaliste, il est temps pour l'Occident et l'Ukraine de s'entendre avec la Russie… On pourrait tenter de la faire reculer mais cela ne sera pas possible sans déclencher une troisième guerre mondiale. L'Occident n'est pas prêt à envoyer ses troupes pour protéger l'Ukraine… Dans le même temps, il doit se résigner au fait que l'Otan n'intégrera pas l'Ukraine".

Ainsi, un seul pays européen s'avère être capable de résister à l'expansion sous couvert de l'armée américaine. C'est pourquoi Barack Obama place ouvertement la Russie sur le podium des plus grandes menaces mondiale. Et la Russie réagit tout en souplesse, prend des mesures, sauve l'Europe du "rêve américain" qui sent la poudre et le fascisme.

 

M1A1 Abrams

Les Etats-Unis comptent déployer près de 150 chars et véhicules blindés dans des pays membres de l'Otan, une partie stationnera en Europe de l'Est pour participer à des exercices, a déclaré mardi soir le commandant des forces américaines déployées en Europe, le général Ben Hodges, cité par les médias occidentaux.

"Les troupes viendront pour participer aux exercices, puis elles rentreront. L'équipement restera sur place", a indiqué le général.

"Je vais examiner différentes options, comme distribuer ces équipements par lots réduits, pour la taille d'une compagnie ou d'un bataillon, peut-être à travers les Pays baltes, la Pologne, la Roumanie ou la Bulgarie", a-t-il ajouté.

"Près d'une cinquantaine de véhicules blindés sont déjà en place et une centaine de chars Abrams M1 et de véhicules de combat Bradley seront «pré-positionnés» en Allemagne, et éventuellement dans d'autres endroits, quand les troupes américaines conduiront leurs exercices conjoints avec des soldats de leurs partenaires de l'Alliance atlantique", a précisé le responsable militaire.

Dans le contexte de la crise ukrainienne, l'Otan a adopté une série de mesures afin d'assurer la sécurité ses alliés en Europe. Ainsi, l'Alliance a intensifié ses patrouilles aériennes au-dessus des pays Baltes et dépêché des renforts en mers Baltique et Méditerranée. Des avions de reconnaissance de l'Alliance survolent régulièrement la Pologne et la Roumanie.

 

Auparavant, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a déclaré que Moscou était persuadé qu'un élargissement irréfléchi et effréné de l'Otan était une erreur qui sapait la stabilité de l'Europe.

RIA NovostiLes forces américaines en Europe et les mythes néocolonialistesLes forces américaines en Europe et les mythes néocolonialistes

15:18 26/11/2014 Plus de 20 ans ont passé depuis la dissolution du Pacte de Varsovie mais les forces d'occupation américaines sont toujours présentes en Europe. Ce paradoxe historique s'appuie sur une mythologie mêlant "la faiblesse de la démocratie en Europe de l'Est", "les régimes totalitaires" et "l'agression russe".>>

RIA NovostiM1A1 AbramsDes blindés américains en Europe de l'Est en 2015

12:00 26/11/2014 Les Etats-Unis comptent déployer près de 150 chars et véhicules blindés dans des pays membres de l'Otan, une partie stationnera en Europe de l'Est pour participer à des exercices, a déclaré mardi soir le commandant des forces américaines déployées en Europe, le général Ben Hodges, cité par les médias occidentaux>>

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27 novembre 2014 4 27 /11 /novembre /2014 01:49

http://cdn-parismatch.ladmedia.fr/var/news/storage/images/paris-match/actu/politique/general-de-gaulle-153470/1530912-1-fre-FR/Que-reste-t-il-de-de-Gaulle.jpg

Avec cette décision, lourde de conséquences politiques et diplomatiques, le chef de l’Etat français rompt avec une tradition d’indépendance nationale vieille de plus de quarante ans que tous ses prédécesseurs, de droite comme de gauche, avaient  respectée.

 

C’est en effet en mars 1966 que le général de Gaulle,(Quand Sarkozy invoque De Gaulle, on s'étrangle à droite:droite.blogs.liberation.fr/alain_auffray/2011/10/pas-ça-pas-lui-nicolas-sarkozy-ne-devrait-pas-se-poser-en-héritier-du-général-de-gaulle-et-en-garant-de-lesprit-de-l.html)

 posant clairement le problème de la compatibilité de l’OTAN avec les intérêts et l’indépendance de la France, avait pris la décision la plus importante sans doute de sa présidence, en annonçant le départ de la France des structures intégrées de l’OTAN, c’est-à-dire du dispositif plaçant les forces alliées sous l’autorité des Américains, et en exigeant le démantèlement de toutes les bases et installations américaines présentes sur le sol national. Il rejetait ainsi une tutelle faisant de la France un pays vassal des Etats-Unis.

La conviction du Général s’était faite bien avant son retour au pouvoir en mai 1958. Dès le milieu des années 1950, l’OTAN était déjà largement discréditée à ses yeux, dans la mesure où elle impliquait une inféodation inacceptable de la politique étrangère française au leadership américain. C’est la raison pour laquelle, le 17 septembre 1958, quelques mois à peine après la fondation de la Ve République, le général de Gaulle avait adressé au président américain, le général Dwight Eisenhower, et au Premier ministre anglais, Harold Macmillan, un mémorandum réclamant la création d’un « directoire » tripartite de l’Organisation composé des trois puissances américaine, britannique et française. Cette demande se heurta rapidement à une fin de non-recevoir de la part des Etats-Unis. L’année suivante, au printemps 1959, le Général décidait de retirer du commandement de l’OTAN la flotte française de Méditerranée (elle sera également retirée en 1964 du commandement allié de l’Atlantique), puis, à l’automne 1960, de n’affecter que partiellement les forces françaises à la défense aérienne intégrée mise en place dans le cadre de l’OTAN. En 1962, il décidait également de ne pas replacer sous le commandement Centre-Europe de l’OTAN deux divisions françaises qui en avaient été retirées lors du conflit algérien, et précisait que la France se tiendrait dans un rôle de réserve par rapport à la « défense de l’avant » que l’organisation intégrée entendait alors mettre en place en Allemagne le long du rideau de fer. A partir de 1963-64, l’affirmation de l’indépendance de la France devint indissociable de la création d’une force de dissuasion nucléaire française indépendante et d’une contestation générale de la politique des blocs instaurée à Yalta. La décision de mars 1966 sera la conséquence logique de cette politique mûrement réfléchie.

Le 21 février 1966, au cours d’une conférence de presse, le général de Gaulle annonce donc le retrait de la France de l’OTAN. Le 7 mars, il fait part au président américain Lyndon B. Johnson de l’intention de la France de recouvrer l’« exercice entier de sa souveraineté ». Deux mémorandums à l’intention des Etats membres de l’Alliance, datés des 11 et 29 mars, en détaillent les modalités. Tout en restant membre à part entière de l’Alliance atlantique, la France se retire de la structure militaire intégrée de l’OTAN. Les forces françaises affectées au commandement de l’OTAN cesseront de l’être à dater du 1er juillet 1966, et les troupes et installations militaires américaines devront avoir quitté le territoire national avant le 1er avril 1967. Les détails de la coopération future entre la France et l’OTAN seront précisés par la négociation qui s’engage à l’automne 1966 entre le général Charles Ailleret, chef d’état-major des armées françaises, et le général américain Lyman Lemnitzer, commandant suprême des forces alliées en Europe. Cette décision aura pour conséquence le transfert en Belgique du Commandement suprême de l’OTAN (SACEUR), jusqu’ici installé à Rocquencourt, près de Versailles.

Bien qu’elle représente une incontestable rupture, la décision de Nicolas Sarkozy ne surprend toutefois pas vraiment. Au cours de ces dernières années, nombre de hauts responsables de l’establishment militaire français sont devenus autant d’agents d’influence de l’atlantisme, tandis que, du côté de la classe politique, la volonté d’indépendance de la France vis-à-vis de l’OTAN s’est incontestablement affaiblie.

En 1986, on avait déjà vu une division française participer à l’exercice « Frankischer Schild », puis 20.000 soldats français engagés en 1987 dans l’exercice « Moineau hardi ». En 1990, l’Allemagne fut réunifiée dans le cadre de l’OTAN, avec l’accord de Mikhaïl Gorbatchev, et non dans le cadre d’une « grande Europe » comme le souhaitait alors François Mitterrand (déclaration de Kiev, 6 décembre 1989). En décembre 1995, la France avait déjà annoncé son retour au conseil des ministres et au comité militaire de l’OTAN (la plus haute autorité militaire de l’Alliance, qui réunit les chefs d’état-major des pays membres) - mais pas au sein du système militaire « intégré ». On sait néanmoins qu’entre 1995 et 1997, Alain Juppé étant alors Premier ministre de Jacques Chirac, la France avait envisagé sa pleine réintégration dans l’OTAN, perspective qui n’avait échoué qu’en raison de l’intransigeance américaine. La France avait en effet posé comme condition à ce retour l’obtention du commandement militaire du flanc sud de l’Alliance, à Naples, ce que les Etats-Unis, peu désireux de placer sous autorité étrangère le commandement de leur VIe flotte, avaient immédiatement refusé.

Les troupes françaises ont ensuite été partie prenante dans la guerre de l’ex-Yougoslavie, tout comme elles l’avaient été dans la première guerre du Golfe. En 1999, la crise du Kosovo donne à l’OTAN l’occasion d’intervenir au moyen d’une offensive de bombardements aériens. La même année, trois pays issus de l’ancien bloc de l’Est, la Pologne, la République tchèque et la Hongrie, adhèrent à l’OTAN. Sept autres pays d’Europe centrale et orientale (Estonie, Lettonie, Lituanie, Slovaquie, Roumanie, Bulgarie, Slovénie) les imiteront en mars 2004. Ces adhésions, nées d’une fascination pour l’Amérique et le système néolibéral, sont bien entendus encouragées par les Etats-Unis, qui souhaitent contrôler l’espace est et sud-est européen, comme pont vers la Caspienne et l’Asie centrale.

En 2003, un groupe de personnalités européennes comprenant Valéry Giscard d’Estaing, Felipe Gonzales, Douglas Hurd et Helmut Kohl, affirme solennellement que « l’Alliance atlantique renouvelée demeure le principal pilier du partenariat entre l’Europe et l’Amérique » (Le Monde, 15-16 juin 2003). A cette date, des officiers français sont déjà « insérés » au sein du SHAPE, c’est-à-dire de l’état-major des puissances alliées en Europe. Le 8 décembre 2005, les Etats-membres de l’OTAN acceptent de participer, à des degrés divers, à la Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS), présente en Afghanistan sous commandement américain. Détail peu connu, durant le printemps et l’été de 2007, l’armée de l’air française a même assuré la protection du ciel des pays baltes dans le cadre de l’OTAN, situation dans laquelle le commandement de l’Organisation aurait parfaitement pu donner à un pilote français, par exemple en cas d’incursion russe, un ordre de tir contre un avion violant cet espace aérien.

Elu président de la République le 2 mai 2007, Nicolas Sarkozy, chef des armées aux termes de l’article 5 de la Constitution, et qui ne dissimule rien de sa sympathie active pour les Etats-Unis d’Amérique, se montre désireux d’aller plus loin. Dès le 27 août 2007, dans son premier grand discours de politique étrangère prononcé devant la Conférence des ambassadeurs en poste à Paris, il laisse entendre que la France reprendra bientôt « toute sa place » au sein de l’Alliance atlantique. Le mois suivant, le ministre français de la Défense, Hervé Morin, engage publiquement une réflexion sur le retour de la France dans la structure militaire intégrée de l’OTAN. «  Ma conviction, déclare-t-il lors de la 5e Université d’été de la défense réunie à Toulouse, est que l’Europe de la défense ne progressera pas si nous ne changeons pas de comportement politique au sein de l’OTAN ».

En avril 2008, au sommet de l’OTAN de Bucarest, Nicolas Sarkozy - qui avait pourtant déclaré, durant sa campagne présidentielle, que la présence française dans ce pays n’était pas essentielle à nos intérêts - accepte d’envoyer, à la demande des Etats-Unis, des troupes supplémentaires en Afghanistan, où 53 000 hommes de 40 pays sont déjà déployés sous l’égide de l’OTAN, aux côtés de 36 000 soldats américains, au sein de deux forces multinationales (Coalition-OpérationEnduring Freedom et Force internationale d’assistance à la sécurité). Il faut rappeler que cette guerre interminable, perdue d’avance, a été engagée au départ à seule fin de garantir l’exploitation par la firme californienne Unocal (absorbée entre-temps par Chevron) du pipe-line devant relier la Caspienne à l’océan Indien via le Turkménistan, l’Afghanistan et le Pakistan. D’où l’installation à la tête de l’Etat afghan du président fantoche Hamid Karzaï, ex-agent de la CIA, ex-expert de l’Unocal chargé de superviser le projet de pipe-line trans-afghan. Cette guerre néocoloniale menée depuis sept ans a eu pour seul effet de stimuler les terrorismes au lieu de l’apaiser, et de renforcer les talibans au lieu de les affaiblir, tandis que la population locale se dressait de plus en plus contre l’occupation étrangère et que l’Afghanistan se transformait peu à peu en un Etat narcotrafiquant.

Le retour annoncé de la France dans l’OTAN a également servi de toile de fond aux discussions provoquées, en juin 2008, par un nouveau Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale censé dessiner les orientations stratégiques de la France pour les quinze prochaines années. La publication de ce document, qui annonçait notamment une réduction de 54.000 personnels des effectifs militaires français au cours des années à venir, a vu s’accentuer le clivage entre tenants de l’atlantisme et partisans d’une défense indépendante. On se souvient qu’un groupe d’officiers généraux et supérieurs des trois armées (terre, air, mer), regroupés anonymement dans le groupe« Surcouf », avait alors ouvertement critiqué les nouvelles orientations officielles. Un texte publié sous ce nom dans Le Figaro (19 juin 2008) parlait d’« absence de critères politico-militaires d’intervention », de « flou des priorités géopolitiques », de « dépense publique considérable pour une utilité opérationnelle faible », de « véritable déclassement militaire de notre pays, dans un monde bien plus dangereux qu’hier ». En réponse, Sarkozy a tenté de faire identifier les contestataires afin de les sanctionner, à un moment où ses relations avec l’armée s’étaient particulièrement dégradées (affaire du 3e RPIMA de Carcassonne, démission du général Cuche, etc.).

Le Livre blanc prône en fait une évolution de la stratégie de défense tendant à abandonner les moyens d’intervention externes lourds (aviation, second porte-avions) au profit des armements terrestres légers et, surtout, des techniques et des moyens de renseignement (satellites, drones, systèmes de surveillance spatiale, etc.). Le géopoliticien Aymeric Chauprade, récemment mis à la porte du Collège Interarmées de Défense par Hervé Morin, note que ce glissement stratégique correspond à un renoncement par la France à sa capacité d’intervention autonome afin de mieux favoriser son intégration au sein de l’OTAN. Il s’agit en fait de transformer l’infrastructure de la défense française en un système plus spécialisé mis à la disposition des Etats-Unis et, plus largement, d’une coalition politique occidentale tout à fait conforme à la doctrine américaine du « choc des civilisations », l’idée générale étant qu’il faut répondre aux « menaces » par l’intégration croissante des nations occidentales, dans un monde où il n’y a plus de différence entre défense nationale et sécurité, entre sécurité intérieure et extérieure (cf. la récente fusion de la DST avec une partie des effectifs des Renseignements généraux pour former le Renseignement intérieur).

Au ministère de la Défense, on fait par ailleurs observer que la France participe déjà à la plupart des opérations de l’Alliance, que des généraux français commandent régulièrement certaines opérations de l’OTAN, et que la France contribue aussi à hauteur de 13% au budget de l’Organisation (elle est aujourd’hui le troisième contributeur financier pour les activités de l’OTAN auxquelles elle participe et le cinquième pour l’ensemble des opérations). La conclusion qu’on en tire est que la réintégration dans le dispositif intégré n’a pas l’importance que certains lui attribuent (« il ne s’agit pas de la révolution qu’on prétend », dit Hervé Morin). C’est évidemment sous-estimer la portée symbolique d’un tel geste. Et d’ailleurs, si c’est vraiment si peu important, pourquoi le faire ?

Nicolas Sarkozy, quant à lui, a eu recours à un argument des plus étonnants. Dans son discours aux ambassadeurs du 27 août 2007, il a déclaré que, « pendant les décennies de contrainte bipolaire, comme pendant la décennie de situation unipolaire, il était juste et souhaitable que notre pays marque sa différence par rapport à Washington », tandis qu’aujourd’hui c’est la politique inverse qui s’impose. Déclaration prononcée avec un aplomb stupéfiant, car c’est exactement à l’argument opposé que recouraient, pour condamner la décision prise en 1966 par le général de Gaulle, ceux qui professaient alors le même atlantisme que le chef d’Etat français actuel. A l’époque, à les en croire, c’est précisément parce que le monde était alors bipolaire que toute dissidence par rapport au camp américain revenait à faire le jeu de Moscou. Quant au contraste dressé par Sarkozy entre les deux époques, il est encore plus ridicule, car c’est précisément au moment où nous entrons dans un monde multipolaire qu’un alignement sur Washington devient totalement inconsidéré. En d’autres termes, si la décision du Général était en 1966, en pleine guerre froide, parfaitement justifiée, le maintien de la France en dehors de l’OTAN l’est plus encore aujourd’hui, maintenant que la guerre froide est terminée. C’est justement dans un monde multipolaire, instable par définition, que l’on a besoin d’une défense indépendante non alignée.

Depuis la désintégration du système soviétique, l’OTAN n’a en réalité plus de raison d’être. Créée lors de la signature du traité de l’Atlantique-Nord, le 4 avril 1949, pour prémunir l’Europe occidentale contre la puissance russe, alors considérée comme une menace, cette organisation est un pur produit de la guerre froide. Lors de la chute du Mur de Berlin, elle aurait du être dissoute comme fut dissous le Pacte de Varsovie, pour une raison toute cartésienne : une alliance ne survit pas aux raisons qui l’ont fait naître. Il n’en fut rien, bien au contraire.

Loin de faire disparaître l’OTAN, les Américains ont redéfini sa mission, sans aucune concertation ni réflexion globale avec leurs alliés, en étendant toujours plus loin sa zone de compétence, et d’abord en direction de l’Europe centrale et orientale. Dans le conflit de l’ex-Yougoslavie, on vit ainsi l’Alliance atlantique prendre en main la gestion militaire de la crise, puis le contrôle de la mise en application des accords de paix. L’OTAN a ainsi complètement changé de nature. Elle projette désormais forces et puissance dans le « hors-zone », notamment à travers les programmes de« Partenariat pour la paix » et de « Dialogue méditerranéen ». Elle a parallèlement poursuivi sa marche vers l’Est, en violation formelle des assurances données par les Etats-Unis à Mikhaïl Gorbatchev lors de la réunification allemande. Dès le 11 septembre 2001, le président George W. Bush avait d’ailleurs pris position pour une « grande OTAN [...] de la Baltique à la mer Noire », afin de s’ouvrir la voie de la Caspienne et de la mer Noire. Ces orientations ont été confirmées au sommet atlantique de Prague, les 21 et 22 novembre 2002 : l’organisation atlantique passe alors clairement d’une perception géographie limitée à une perception fonctionnelle globale des enjeux de sécurité. La Déclaration de Prague stipule en effet que l’OTAN doit désormais pouvoir aligner des « forces capables de se déployer rapidement partout où elles sont nécessaires [...] de mener des opérations à longue distance et dans la durée ». On passe, en d’autres termes, d’une structure relativement statique à un modèle expéditionnaire d’interventions tous azimuts, les centres de gravité de la géostratégie mondiale glissant dans le même temps vers le Moyen-Orient et l’Asie.

Pour répondre à cette nouvelle orientation, les structures de l’OTAN ont été modifiées. Jusqu’en 2003, les opérations militaires de l’OTAN se partageaient en deux grands commandements stratégiques, l’un et l’autre placés sous la direction d’un officier supérieur américain : le Commandement suprême des forces alliées en Europe (SACEUR) et le Commandement suprême des forces alliées de l’Atlantique (SACLANT). Ce dernier a aujourd’hui cédé la place à un Commandement stratégique de la transformation (ACT), les alliés étant invités à participer à la création d’une Force de réaction rapide de l’OTAN comprenant 21 000 soldats appartenant à des unités européennes et susceptibles d’intervenir « partout où il le faudra ». Quant au SACEUR, basé au quartier général du SHAPE, il désigne désormais le Commandement Allié Opérations. Il est dirigé par un général américain assurant aussi le commandement des forces armées en Europe, dont le quartier général se trouve à Stuttgart.

L’OTAN réunit aujourd’hui 24 pays européens et deux Etats nord-américains. Elle comprend 22.000 employés et 60.000 militaires permanents. Transformée en simple alliance politico-militaire des Occidentaux, cimentée par les « valeurs occidentales » et le postulat sans cesse réaffirmé d’une communauté d’intérêts « transatlantique », on peut la considérer comme une sorte de gendarme planétaire chargé de la défense des intérêts occidentaux. Hervé Morin souscrit à ce programme :« Que doit devenir l’OTAN ? [...] A mon sens, l’Alliance doit défendre un certain nombre de valeurs. Lesquelles ? Celle de la communauté euro-atlantique. Celle-ci repose sur des fondements philosophiques communs : le libéralisme, la démocratie, les droits de l’homme » (Le Nouvel Observateur ; 12 juin 2008, p. 67). Nicolas Sarkozy s’est également réclamé de ces « valeurs occidentales » dans son discours aux ambassadeurs de janvier 2008.

C’est donc à cette nouvelle OTAN, devenue une coalition occidentale de légitimation diplomatique des entreprises américaines, qui a pour but de porter la guerre aux confins de la planète à seule fin de défendre les intérêts géostratégiques des Etats-Unis, que Nicolas Sarkozy a décidé de faire pleinement adhérer la France. La seule vraie question qui se pose alors est : pourquoi ?

Deux raisons ont été avancées. La première est qu’en revenant dans l’OTAN, la France pourra mieux peser sur ses orientations et sa réorganisation, c’est-à-dire qu’elle pourra mieux se faire entendre à Washington. La deuxième est qu’elle n’en sera que plus forte pour construire un pôle européen de la défense et désarmer les réticences de ceux de ses partenaires qui ne veulent à aucun prix d’une défense européenne indépendante de l’OTAN.

Croire qu’en étant « dedans », on pèsera mieux sur l’évolution interne de l’Alliance est en réalité une illusion. Les Britanniques ou les Allemands, fidèles partenaires des Américains, sont-ils jamais parvenus à influer en quoi que ce soit sur les stratégies de l’OTAN ? Au surplus, tout diplomate, même débutant, sait que lorsque l’on s’engage dans une négociation, les exigences que l’on entend voir satisfaites doivent être formulées avant de prendre l’engagement qui en constitue la contrepartie : c’est avant de faire une concession qu’on négocie, et non après. (Les prostituées le savent aussi : elles font payer leurs clients avant, non après).

Cela montre que jamais les Etats-Unis n’admettront que soit remis en cause leur leadership. Les gains escomptés à Paris ne sont au mieux que de pieux souhaits.

De toute évidence, ce n’est pas la promotion de quelques dizaines d’officiers français dans les états-majors de l’OTAN, ni les postes de commandement promis aux Français - la direction de l’ACT, basée à Norfolk, en Virginie, qui est l’un des quartiers stratégiques de l’OTAN, et un commandement régional à Lisbonne, quartier général de la Force de réaction rapide (dont la direction dépend entièrement du commandement suprême américain en Europe) - qui permettront de peser en quoi que ce soit. La vérité est qu’au sein de l’OTAN, le partenariat et l’intégration se résument à la subordination, quand ce n’est pas à l’alignement automatique. L’OTAN reste plus que jamais une machine de guerre américaine, contrôlée par les Américains et destinée à asseoir leur hégémonie sur des alliés transformés en vassaux. L’OTAN n’a qu’un seul commandement opérationnel suprême, le SACEUR, qui reste entre les mains du général américain commandant les forces américaines en Europe. Au sein de l’OTAN, ce sont les Américains qui décident, les Européens étant considérés simplement comme des exécutants. Lors de sa visite à Paris, le 12 février 2009, Jaap de Hoop Scheffer a d’ailleurs bien précisé que, si la France réintégrait le commandement militaire intégré de l’OTAN, ce serait de toute façon toujours à lui qu’il reviendrait de « gérer les choses au sein de l’OTAN ».

L’autre raison est, elle aussi, constamment ressassée dans les milieux officiels. Sarkozy déclarait ainsi, le 17 juin 2008 : « Notre position, hors du commandement militaire [de l’OTAN], entretient une méfiance sur l’objet de notre ambition européenne »« Depuis dix ans, ajoute Hervé Morin, l’Europe de la défense piétine parce que nos partenaires européens ont l’impression que les Français veulent en faire un substitut à l’OTAN, à laquelle ils sont viscéralement attachés ». On en conclut que, si la France rentre dans l’OTAN, ses partenaires seront plus disposés à faire progresser la défense européenne, et que les Américains verront du même coup que les efforts déployés par Paris en faveur de celle-ci ne sont en rien dirigés contre eux. Sarkozy, qui ne manque pas une occasion de mettre en parallèle son intention de revenir au sein du commandement militaire intégré de l’OTAN et son désir de « donner une nouvelle impulsion à l’Europe de la défense », cite à ce propos les déclarations de George W. Bush au sommet de l’OTAN de Bucarest : « Le président des Etats-Unis a apporté son soutien au projet de défense européenne ; il l’a fait parce qu’il était convaincu qu’en portant ce projet, la France ne souhaitait pas affaiblir l’Alliance atlantique, que les deux étaient complémentaires et non antagonistes ». Tout à la recherche de l’approbation de Washington, Sarkozy ne réalise évidemment pas que ce que beaucoup lui reprochent, en France, c’est précisément de ne pas concevoir le projet de défense européenne comme une alternative au« parapluie » américain. Et que, par de telles prises de position, il confirme au contraire son intention de transformer l’Europe de la défense en un simple « pilier européen » de l’OTAN.

Le retour de la France dans l’OTAN ne lève en fait aucune des hypothèques qui pèsent sur l’avenir de l’Europe de la défense, celle-ci restant bloquée par les vues divergentes des Etats-membres.

Malgré les progrès de la Politique européenne de sécurité et de défense (PESD) instaurée en février 1992 par le traité de Maastricht, puis réaffirmée par les traités d’Amsterdam (1997) et de Nice (2000), la déclaration franco-britannique de Saint-Malo (4 décembre 1998) et le Conseil européen d’Helsinki (10-11 décembre 1999), malgré la fondation en juillet 2004 d’une Agence européenne de défense (AED) placée sous l’autorité de Javier Solana, la défense européenne n’avance pas. Elle se borne à prendre en charge la « gestion de crise » et les missions ne relevant pas de la défense collective de l’Europe, c’est-à-dire qu’elle relève moins de la défense que de la sécurité. Bien entendu, il n’existe au niveau européen aucun état-major stratégique comparable au SHAPE de l’OTAN, ce qui signifie que toute opération européenne passe par l’organisation atlantique chargée d’en assurer la planification stratégique, ainsi que ce fut le cas pour la mission « Concordia » en Macédoine (2003) ou la mission « Althéa » en Bosnie-Herzégovine (2004). Comme l’a écrit Jean-Sylvestre Mongrenier, « l’Europe de la défense n’est pas la défense de l’Europe ».

Les Etats-Unis, qui ont depuis longtemps l’habitude de répondre par des moyens militaires à des défis qui pourraient trouver des réponses d’une autre nature, politique ou diplomatique en particulier, représentent aujourd’hui plus de 50% des dépenses militaires mondiales, ce qui signifie qu’ils dépensent à eux seuls pour leur armement plus que l’ensemble de tous les autres pays du monde. Au regard de ce formidable effort de puissance, les dépenses militaires des Européens apparaissent extraordinairement limitées. La « défense européenne » n’est actuellement qu’une juxtaposition de budgets et d’équipements nationaux souvent incompatibles entre eux. Alors que pour le seul secteur de la recherche et du développement, l’effort des Etats-Unis s’est accru de 40% entre 1990 et 2000, il a dans le même temps diminué de 22% chez les principales puissances militaires de l’Union européenne. Quant aux capacités de projection européennes, elles ne représentant même pas 20% des capacités américaines.

Mais l’essentiel est ailleurs. La défense européenne ne peut résulter que d’une volonté politique européenne qui pour l’heure n’existe pas, précisément parce que la plupart des Etats-membres de l’Union européenne préfèrent s’en remettre aux Etats-Unis du soin d’assurer leur sécurité. Depuis la conférence atlantique de décembre 1991, on sait que les partenaires de la France refusent absolument d’envisager un système de défense indépendant de l’OTAN qui risquerait d’éloigner, si peu que ce soit, les Etats-Unis du théâtre européen. Les Européens ne veulent pas d’une défense européenne indépendante de l’OTAN, de même qu’ils ne veulent pas d’une Europe-puissance qui se construise en dehors de la relation atlantique. Ils ne veulent pas de ce que le général de Gaulle appelait le 23 juillet 1964 une « politique européenne indépendante ».

Au demeurant, le principe d’une défense européenne autonome a été expressément exclue par le traité de Maastricht, dont le texte précise que « l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord reste pour les Etats qui en sont membres le fondement de leur défense collective et l’instance de sa mise en ouvre ». La politique européenne de sécurité et de défense (PESC) ne saurait donc porter atteinte aux intérêts de l’OTAN, ni même diverger de ses orientations. En 2004, au sommet de l’OTAN d’Istanbul, Jacques Chirac était allé jusqu’à déclarer : « Il n’existe pas, il ne peut pas exister, d’opposition entre l’OTAN et l’Union européenne ». Les Européens se sont ainsi ligotés eux-mêmes, s’interdisant par avance de faire de l’Europe une puissance capable, au sein d’un monde multipolaire, de rivaliser avec les Etats-Unis, voire de s’opposer à eux.

Croire qu’en échange du retour de la France dans l’OTAN, les Etats-Unis se montreront plus disposés à accepter la mise en place d’une Europe de la défense est donc pour le moins naïf. Ils ne l’accepteront que dans la mesure où cette défense n’aura aucun caractère autonome. Présenter la réintégration de la France dans l’OTAN comme un préalable indispensable à la construction d’une véritable défense européenne est en outre un sophisme, dans la mesure où la plupart des pays européens ne veulent précisément pas d’une défense commune, considérant que tout progrès en ce sens constituerait un défi à l’OTAN et aux Américains. La défense européenne ne peut être mise en œuvre aussi longtemps que la plupart des Etats européens continueront à penser que les Etats-Unis la remplacent avantageusement. L’abandon par la France de son statut spécifique est-il de nature à les convaincre de renoncer à cette idée ? Elle ne peut, au contraire, que les renforcer dans leur conviction qu’il est bien inutile de consacrer leurs efforts à une défense européenne. Voyant la France rentrer dans le giron atlantique, ceux qui considèrent que l’armée américaine suffit à défendre l’Europe ne pourront qu’être confortés dans leur choix en faveur de la facilité et de la démission. Loin de relancer la défense européenne, le retour de la France dans l’OTAN risque même de signer sa mort définitive en entérinant une forme de division du travail entre l’Alliance atlantique et une Union européenne incapable de prendre en charge sa propre sécurité.

François Bayrou n’a donc pas eu tort de voir dans la réintégration de l’OTAN une « défaite pour la France et l’Europe » et un « aller sans retour ». Beaucoup de socialistes ont également protesté, assez mollement toutefois, ce qui ne saurait surprendre de la part d’un parti dont la quasi-totalité des députés européens se sont engagés à Strasbourg, en mai 2008, à participer à l’instauration d’un grand « marché commun transatlantique sans entraves en 2015 ». (Ce projet, qui engage la France dans une promotion fanatique du libre-échange mondial, consacre l’évolution de l’Union européenne vers une vaste zone de libre-échange fondée sur la libre circulation des biens et des services et prélude, semble-t-il, à une véritable « Assemblée transatlantique », c’est-à-dire à la mise en place d’institutions politiques communes aux deux côtés de l’Atlantique). Jean-Pierre Chevènement, sans surprise, s’est en revanche inquiété de voir la France s’engager « dans une mécanique qui réduira obligatoirement notre marge d’indépendance », en attendant de l’entraîner « dans des guerres qui ne sont pas les nôtres ». Pour le socialiste Jean-Michel Boucheron, « si la France entre dans l’OTAN, il n’y a plus d’espoir de politique étrangère et de sécurité commune, plus d’Europe de la défense ».

Au sein même de la majorité, plusieurs personnalités ont exprimé leurs réticences. Dominique de Villepin a laissé prévoir un « rétrécissement » de la France sur le plan diplomatique, parlant d’une« faute » susceptible de faire passer la France « sous les fourches caudines d’un autre pays ». Alain Juppé s’est inquiété d’un « marché de dupes ». L’ancien député UMP Daniel Garrigues est allé jusqu’à parler de « trahison ». Nicolas Dupont-Aignan, député de l’Essonne, évoque une « faute historique d’une gravité incalculable » et ajoute : « Nicolas Sarkozy devra assumer devant l’histoire le rôle de fossoyeur d’un symbole fort de l’identité française : la politique d’indépendance nationale instaurée par le général de Gaulle il y a plus d’un demi-siècle ». « Ce ralliement, dit Philippe de Villiers, traduit la dérive d’une large élite politique française qui n’a plus d’autre horizon que l’alignement systématique sur les Etats-Unis. L’idée que la France ait à jouer un rôle spécifique de puissance d’équilibre et de médiation, en s’appuyant sur une diplomatie libre, indépendante, non alignée, étrangère à la notion de bloc, aiguillon d’une Europe européenne, leur est devenue totalement étrangère ». Le Premier ministre François Fillon a décidé d’engager la responsabilité de son gouvernement sur cette question, mais il s’est bien gardé de céder à la demande de référendum formulée par François Bayrou ou Nicolas Dupont-Aignan.

Bien entendu, le retour de la France dans l’OTAN a en revanche été salué à Washington, notamment par Gordon Johndroe et Tom Casey, porte-parole respectifs de la Maison Blanche et du département d’Etat. Les Américains, plus que jamais demandeurs de troupes, puisqu’ils ne peuvent plus faire face seuls à tous les théâtres de conflits où ils sont présents, se réjouissent par avance d’être mieux en position d’exiger de la France qu’elle s’associe plus étroitement à eux dans les guerres présentes (Afghanistan) comme dans les combats futurs (Iran).

La décision prise en 1966 par le général de Gaulle était déjà motivée, de façon implicite, par sa volonté de maintenir la dimension multipolaire du monde. En se retirant de l’OTAN, le Général offrait la possibilité à un certain nombre de nations de se tenir aux côtés de la France sans plus souscrire à l’ordre bipolaire né des accords de Yalta. En mettant un terme à l’« exception française », Nicolas Sarkozy scelle la fin de la politique étrangère et de l’indépendance stratégique de la France, donnant ainsi le coup de grâce à toute l’œuvre diplomatique du général de Gaulle.

Il est de toute évidence irresponsable de rejoindre l’OTAN au moment où celle-ci apparaît plus que jamais comme l’alliance du monde occidental contre le reste du monde, comme une coalition ayant pour volonté d’imposer au reste du monde la supériorité des valeurs occidentales, qui ne sont en dernières analyses que des valeurs marchandes, provoquant tout à la fois la crispation de la Russie, qui se sent de plus en plus encerclée par les Occidentaux, et l’hostilité de tous les pays, notamment arabo-musulmans, rebelles instinctivement à la dimension de croisade néocoloniale affichée par l’Alliance. C’est à une normalisation atlantiste que revient cette décision, qui sera inévitablement perçue et interprétée comme un réalignement, sinon comme une capitulation, en même temps que comme la marque d’une « banalisation » de la position de la France, d’un affaiblissement de son autonomie et d’un renoncement à ses ambitions. En s’alignant sur l’hyperpuissance américaine au sein d’un bloc occidental monolithique, amorce d’une sorte d’empire néo-occidental, la France perd tout espoir d’être entendue comme une puissance indépendante dans un certain nombre de conflits, notamment au Proche et au Moyen-Orient.

Prise sans concertation ni exigence de contrepartie, sans débat politique préalable, sans que le peuple soit consulté, à seule fin de complaire aux Etats-Unis, sur lesquels il s’est aligné dès son élection, au moment même où l’OTAN se montre incapable d’obtenir des résultats décisifs en Afghanistan et ne cesse d’attiser les tensions avec la Russie, la honteuse décision de Nicolas Sarkozy revient purement et simplement à rentrer dans le rang. Elle crée les conditions dans lesquelles il sera de plus en plus difficile de dire « non » aux Américains, car la France ne disposera plus que d’une marge de manœuvre plus réduite. Les soldats européens continueront de faire office de supplétifs de l’US Army, en se faisant tuer dans des guerres qui ne sont pas les leurs, comme aujourd’hui en Afghanistan, et demain peut-être en Iran. Le général de Gaulle disait : « Je veux l’Europe pour qu’elle soit européenne, c’est-à-dire qu’elle ne soit pas américaine ». Nicolas Sarkozy, lui, fait cadeau de la France à l’OTAN, c’est-à-dire aux Etats-Unis. Un cas exemplaire de haute trahison ?


Article paru initialement sur le blog de polémologie THEATRUM BELLI

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24 novembre 2014 1 24 /11 /novembre /2014 18:23

 

Soldats américains qui gardaient une entrée principale de l'Dachau après la libération en 1945 (Archives)

 

 

Par Nika Filimonova, RIA Novosti

Après la Seconde Guerre mondiale, en échange d'une généreuse récompense et de perspectives de carrière, d'anciens nazis étaient recrutés par la CIA et le FBI pour combattre l'URSS. Avec le temps, ces liens avec les nazis ont commencé à peser sur les Américains.

Les États-Unis ont activement recruté d'anciens nazis pendant la Guerre froide, révèle le livre Des nazis près de chez vous: comment les États-Unis sont devenus un refuge sûr pour les hommes de Hitler (The Nazis Next Door: How America Became a Safe Haven for Hitler's Men). Son auteur, Eric Lichtblau, se base sur des archives déclassifiées montrant que des milliers de militaires et de chercheurs ayant servi le Troisième Reich sont partis après la Seconde Guerre mondiale de l'autre côté de l'océan à la recherche d'une vie paisible.

En échange d'une généreuse récompense et de perspectives de carrière, la CIA et le FBI exigeaient de leurs "subordonnés" des informations précieuses et une aide pour combattre leur "ennemi juré" – l'URSS.

Le recrutement d'anciens collaborateurs du Troisième Reich a commencé dans les années 1950, à l'aube de la Guerre froide. Cette décision a été prise par les dirigeants des deux principales directions des renseignements américains – Edgar Hoover et Allen Dulles. Selon eux, les ex-nazis pouvaient fournir à Washington toutes les informations nécessaires sur les plans de l'Union soviétique, explique le docteur en histoire Sergueï Bouranok:

"Premièrement, ils avaient de la valeur pour les renseignements qu'ils détenaient sur l'Union soviétique - il était question d'officiers des services secrets - concernant les méthodes de guerre contemporaine. On faisait aussi activement appel aux Biélorusses qui avaient collaboré avec le régime allemand, aux Ukrainiens, aux habitants des pays baltes, aux Hongrois et aux Croates. Le travail avec les Croates était supervisé par Hoover. Il pensait que ces régions – les Balkans, l'Europe de l'est – étaient les mieux placées pour combattre l'Union soviétique, que les informations d'anciens agents allemands aideraient à lutter contre les communistes, et il les recrutait activement. Deuxièmement, il s'agissait d'une extension du réseau d'agents à travers le monde. Parce qu'ils ne travaillaient pas seulement contre l'URSS, mais même contre leurs alliés au Royaume-Uni, ainsi qu'au Moyen-Orient et même en Israël."

Les nazis, eux, n'avaient rien à perdre car la peine de mort les attendait en Europe, ou au mieux la prison. Alors que les Américains leur proposaient une bonne rémunération et des conditions de vie correctes, déclare le docteur en histoire Dmitri Sourjik:

"On promettait la vie aux Allemands. Celle de beaucoup d'entre eux – même des criminels de bureau qui élaboraient des missiles et des armes nucléaires – était pendue à un fil. Deuxièmement, on leur promettait de l'argent. En effet, en arrivant aux USA certains experts en fusées allemands ont intégré l'armée américaine mais signaient également des contrats avec de très grands monopoles. En d'autres termes, on leur promettait la vie, une situation financière et de nouveaux documents: un nouveau départ à partir d'une page blanche."

Les volontaires étaient nombreux. Parmi les principaux informateurs des USA on compte ainsi Otto von Bolschwing, le bras droit d'Adolf Eichmann, responsable logistique de la "solution finale". Grâce à son service dévoué pour Washington Bolschwing a plus tard reçu la citoyenneté américaine. Et les exemples ne manquent pas. Cette "amitié" était profitable aux deux camps car les renseignements des nazis ont considérablement aidé les Américains, souligne l'historien Dmitri Sourjik:

"Les liens avec d'anciens criminels de guerre ont été activement exploités et ont notamment aidé les Américains pour la construction des fusées. Bien que les USA y aient travaillé, la qualité de leurs appareils était alors inférieure à celle des Soviétiques. Les chercheurs nazis ont permis de faire significativement avancer le programme américain de fusées. Puis on établissait le contact avec la clandestinité nationaliste. Et toute une pléiade de nationalistes ukrainiens a été recrutée à titre de consultants dans divers services du département d’État.

Ils étaient chargés des contacts avec la clandestinité nationaliste dans le domaine du renseignement. Ces contacts recueillaient des informations - autrement dit ils avaient construit un réseau d'informateurs sur la situation en Union soviétique."

Avec le temps, ces liens avec les nazis ont commencé à peser sur les Américains. C'est pourquoi au début des années 1980 beaucoup d'entre eux ont été "priés" de quitter leur asile et de revenir en Europe. Bien évidemment moyennant rémunération. Et les ex-nazis ont évidemment accepté.

RIA NovostiSoldats américains qui gardaient une entrée principale de l'Dachau après la libération en 1945 (Archives)Quand les États-Unis recrutaient des nazis

18:00 24/11/2014 Après la Seconde Guerre mondiale, en échange d'une généreuse récompense et de perspectives de carrière, d'anciens nazis étaient recrutés par la CIA et le FBI pour combattre l'URSS. Avec le temps, ces liens avec les nazis ont commencé à peser sur les Américains.>>

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24 novembre 2014 1 24 /11 /novembre /2014 16:42
L'Otan se fiche de la crise et de ses conséquences , 

sa préocupation c'est de mener sans fin des guerres contre l'humanité.

L'Otan invite ses membres à augmenter leurs dépenses militaires

 

 

BRUXELLES, 24 novembre - RIA Novosti

Le secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg a invité lundi les pays membres de l'Alliance à augmenter leurs dépenses militaires lors d'une réunion de l'Assemblée parlementaire de l'Otan à La Haye.

L'Otan multiplie par cinq son activité militaire en Europe (Stoltenberg)

"Il serait mieux de réduire nos dépenses militaires en temps de paix. Mais nous ne vivons pas en temps de paix. Il faut (...) augmenter les dépenses militaires", a déclaré M.Stoltenberg.

Le secrétaire général a rappelé que les pays membres de l'Alliance avaient décidé d'augmenter leurs dépenses militaires, les portant à 2% du PIB en dix ans. "J'espère que nous atteindrons cet objectif (...). Tous les alliés doivent verser leur part", a-t-il noté.

© RIA Novosti.

 

Réunis le 5 septembre dernier à Newport, au pays de Galles, les dirigeants des pays membres de l'Otan ont adopté un plan de renforcement de la défense collective et se sont mis d'accord sur les modalités de création de la Force de réaction rapide destinée à être déployé avant tout le long de la frontière russe. Ils ont déclaré prendre cette décision en réponse à la politique russe à l'égard de l'Ukraine.

Le représentant de la Russie auprès de l'Otan Alexandre Grouchko a déclaré à l'époque que l'Alliance cherchait à justifier ses tentatives d'utiliser sa machine militaire contre la Russie. Selon lui, "cette rhétorique de propagande est avant tout destinée à justifier les décisions prises au Pays de Galles. La société de l'Europe occidentale commencera tôt ou tard à se poser des questions - sur les conséquences de ces ententes pour la sécurité européenne et sur l'utilité des dépenses à l'époque où l'Europe traverse une crise"

 


RIA NovostiL'Otan invite ses membres à augmenter leurs dépenses militaires

18:20 24/11/2014 Le secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg a invité lundi les pays membres de l'Alliance à augmenter leurs dépenses militaires lors d'une réunion de l'Assemblée parlementaire de l'Otan à La Haye.>>

RIA NovostiL'Otan multiplie par cinq son activité militaire en Europe (Stoltenberg)

16:59 14/11/2014 Les activités militaires de l'Alliance atlantique en Europe ont été multipliées par cinq suite aux événements en Ukraine, a annoncé vendredi le secrétaire de l'Otan, Jens Stoltenberg, dans une interview au quotidien italien Corriere della Sera.>>

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22 novembre 2014 6 22 /11 /novembre /2014 14:48

Les experts d’un groupe de réflexion de l’Union européenne exigent que l’UE se prépare à mettre fin au moyen de la force militaire aux grèves et aux manifestations. Du fait de l’ inégalité sociale grandissante dans une économie mondialisée et du nombre de conflits armés croissants à l’intérieur des frontières de l’UE, de telles diatribes se multiplieront inévitablement. 

Dans cette étude réalisée par l’Institut d’Etudes de sécurité de l’Union européenne, les auteurs ont carrément déclaré que face à ces développements, il faudra utiliser l’armée de plus en plus fréquemment pour maintenir l’ordre et protéger les riches de la colère des pauvres.

Le livre, intitulé « Perspectives 2020 pour la défense européenne », a été publié un an après le quasi effondrement du système financier mondial en 2008. Il montre clairement que les universitaires et les politiciens sont parfaitement conscients des implications révolutionnaires de la crise. Ils sont en train de créer différents scénarios qui permettent de réprimer l’opposition de la vaste majorité de la population contre les attaques sociales.

En présentant le mois dernier un compte rendu de cette étude, la radio allemande Deutschlandfunk a rapporté que « Dans le cadre de la politique étrangère et sécuritaire conjointe, les responsabilités de la police et des forces armées sont de plus en plus fusionnées et les capacités de lutte contre les protestations sociales renforcées ». Officiellement, il est question d’interventions dans des pays à l’extérieur de l’UE.

« Mais, en vertu de l’article 222 du traité de Lisbonne, un fondement juridique a été créé pour le déploiement de l’armée et d’unités paramilitaires à l’intérieur d’Etats de l’UE en crise. »

Le livre a été rédigé par une équipe d’universitaires et d’experts dans le domaine de la politique sécuritaire, de la défense et de la politique étrangère. La préface a été écrite par la représentante de la politique étrangère de l’UE, Catherine Ashton. Elle y définit les paramètres à long terme de la politique sécuritaire de l’UE. Son introduction et le fait que l’institut soit une institution de l’UE confèrent à l’étude un sceau d’approbation officiel.

La contribution la plus longue du livre intitulée « L’UE et l’environnement sécuritaire mondialisé » résume l’orientation des projets de l’UE. Le professeur, Tomas Ries, directeur de l’Institut suédois des Affaires internationales, y suggère que l’UE combatte de plus en plus fréquemment les problèmes sociaux par des moyens militaires.

Durant la Guerre froide, Ries était déjà un acteur externe, expérimenté, sélectionneur d’agenda (« agenda-setter ») pour les militaires des pays d’Europe du Nord. Après l’effondrement de l’Union soviétique, il se consacra à l’étude de la politique sécuritaire mondiale.

Ries considère que la menace principale à la « sécurité » est un violent « conflit entre les classes socioéconomiques inégales dans la société mondiale » qui seraient « des tensions verticalement asymétriques dans le village mondial ». Pour dire les choses simplement, la principale « question sécuritaire » est la lutte des classes dans l’économie mondiale mondialisée.

Pour illustrer ces « tensions verticalement asymétriques », Ries présente un diagramme de l’inégalité sociale. En haut il y a les groupes transnationaux, les « Fortune Global 1000 », ou les 1 000 entreprises disposant du plus gros revenu. Il a calculé, qu’en pourcentage de la population mondiale, ils correspondent à 0,1 pour cent, soit près de 7 millions de personnes. Il voit un contingent bien plus vaste dans les centaines de millions d’affamés de la population mondiale. Ceux-ci se trouvent tout en bas du diagramme.

Pour les conflits sociaux, économiques et politiques inévitables qui découlent de cette inégalité, il recommande que l’UE entre en« symbiose » avec les entreprises mondiales. Le pouvoir de ces entreprises « dans les domaines de la technologie et de l’économie ne cesse de croître et par conséquent elles gagnent aussi de l’influence dans d’autres domaines. Mais, elles ont besoin de l’État et l’État a besoin d’elles ».

De par la crise financière, l’État a déjà assumé sa part dans la « symbiose ». Les dettes des banques ont été chargées sur le dos de la population et les conditions de vie de la classe ouvrière ont été attaquées et minées.

Comme conséquence de ces attaques fondamentale contre les droits sociaux de la classe ouvrière, un conflit social va inévitablement se développer, selon Ries, et qui affectera d’importantes parties de l’infrastructure.

Ries cite des exemples du type de luttes ouvrières auxquelles il pense : la grève des éboueurs de Naples, en Italie, la grève des pompiers de Liverpool, en Angleterre, et des aiguilleurs du ciel aux États-Unis.

Dans toutes ces situations, l’armée avait été utilisée pour maintenir l’infrastructure. Bien qu’il ne s’agisse pas là du travail de l’armée, Ries prévient que dans les années à venir l’armée devra être déployée de plus en plus fréquemment sur le plan intérieur. En raison de ces tensions, écrit-il, on fera appel plus fortement à un « travail de police » qui sera effectué par l’armée.

Depuis que ces lignes ont été écrites, des soldats ont été déployés contre des grévistes en Espagne et en Grèce, ou bien la loi martiale a été instaurée pour les forcer à reprendre le travail. Pour Ries, ceci est inévitable.

Les riches doivent être protégés des pauvres, explique le professeur. Puisque « le pourcentage de la population qui est pauvre et frustrée continuera d’être très élevé, les tensions entre ce monde et le monde des riches continueront de croître avec les conséquences qui en découlent. Puisque qu’il nous sera à peine possible de surmonter les causes de ce problème d’ici 2020, c’est-à-dire les défauts de fonctionnement de la société, nous devrons nous protéger plus efficacement ».

Par « défauts de fonctionnement, » Ries entend les conséquences sociales du système de profit capitaliste mondial, tout comme les guerres qui sont menées pour garantir son maintien. Mais ce sont là deux composantes fondamentales du système capitaliste et qui poussent de plus en plus de gens dans la pauvreté ou à devenir des réfugiés. La protection des riches contre les pauvres est décrite par Ries comme une« stratégie du perdant », c’est-à-dire une stratégie à l’encontre des perdants du système. Bien que « moralement très suspecte, » il n’y aura« aucune façon de la contourner si nous ne sommes pas en mesure de surmonter les causes de ce problème ».
Par ses remarques, Ries résume la perspective sociale de la classe dirigeante. Elle est prête à défendre ses privilèges et sa richesse face à l’opposition de la population.

Ries ne demande pas uniquement un régime militaire européen pour réprimer les grèves mais il réclame aussi un renforcement massif des États de l’UE. D’ici 2020 au plus tard, l’UE devra considérablement élargir ses capacités militaires afin de disposer de toute la gamme de capacités indispensables pour mener un combat de haute intensité, fait remarquer Ries.

Selon Ries, la paix entre les grandes puissances « est totalement et entièrement tributaire du fonctionnement de l’économie mondiale ». « Si elle se brisait, l’ordre politique pacifique serait probablement aussi détruit ». C’est à cela que doit se préparer l’UE.

Ries décrit la Russie comme étant tout particulièrement dangereuse pour l’UE. « Une forte politique d’hégémonie » est exigée contre ce pays. Entre-temps, depuis que ces lignes ont été écrites, l’UE a établi sa « politique d’hégémonie ». Après avoir orchestré un coup d’État fasciste en Ukraine pour repousser l’influence russe, la voie de la confrontation a été adoptée contre le Kremlin. Ries décrit comment ceci va encore évoluer : en une guerre à l’extérieur du pays et une guerre à l’intérieur.

Source : Sott

http://news360x.fr/les-conseillers-aupres-lue-preconisent-recours-larmee-combattre-les-greves-les-manifestations/

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22 novembre 2014 6 22 /11 /novembre /2014 14:30

La Grèce est généralement considérée comme le pays où tout ce qui pouvait mal se passer, s’est effectivement mal passé. Les Grecs ont truqué leurs comptes pour entrer dans la zone euro, alors que le pays était loin d’être prêt sur le plan économique pour cette intégration. Ils font donc maintenant partie de la zone euro et il serait extrêmement difficile, sinon impossible, de les en faire sortir.

La Grèce a été forcée de se maintenir dans la monnaie unique par le reste de l’Europe et avec l’aide du FMI, mais seulement au prix de grands sacrifices de sa population. Le taux de chômage atteignait 26,4% en juillet 2014, et il dépasse même 56% pour les jeunes de moins de 25 ans. Il est très improbable que cette situation s’améliore à court terme.

Dans  ce contexte, trouver un emploi est un véritable défi, et de nouvelles formes d’esclavage font leur apparition, note le blog Zero Hedge. Il cite un autre blog, KeepTalkingGreece, qui indique que le ministère de l’Éducation grec propose plus de 1100 emplois à pourvoir pour des enseignants prêts à travailler de façon bénévole, c’est-à-dire, sans salaire. De cette manière, il compte combler les postes vacants dans les écoles.

L’accord du plan de sauvetage signé avec la troïka composée du Fonds Monétaire Internationale, de la Commission européenne, et de la Banque Centrale Européenne, prévoit en effet que la Grèce ne peut pas remplacer les fonctionnaires qui partent en pension. Il a donc eu pour conséquence de raréfier les professeurs des écoles, et la pénurie d’enseignants est désormais telle qu’elle est devenue ingérable. Andreas Loverdos , le ministre de l’Education, a cependant reconnu qu’il ne disposait pas des fonds qui lui auraient permis de recruter « normalement » des enseignants pour répondre à ce problème.

Les volontaires qui accepteront ces 1100 postes de professeurs seront en fait récompensés avec un système de « points de bonus » qui pourrait les aider à retrouver un emploi rémunéré par la suite.

Au début de cette année, une étude de l’Institut du travail de la Confédération des syndicats du Travail (GSEE), dont le blog KeepTalkingGreece avait eu connaissance, avait décrit quelques aspects de la situation des travailleurs grecs. On y apprenait notamment :

. Que les travailleurs perçoivent leurs salaires avec un retard de 3 à 12 mois.

. Que les travailleurs ne perçoivent qu’un tiers de leur salaire, le reste est payé en nature, par exemple avec un séjour gratuit dans un hôtel, de la nourriture gratuite ou des bons aliments et d’autres produits dans les supermarchés.

. Que le paiement des 13ème et 14ème  mois  de salaire, rendus obligatoires par la législation grecque, et traditionnellement versés à Noël et Pâques, n’est plus assuré totalement. En compensation, les salariés obtiennent de la nourriture et / ou des bons pour le carburant. Les employeurs les forcent à signer un reçu attestant qu’ils ont perçu l’intégralité de leurs primes. La GSEE estime qu’un million de travailleurs seraient concernés.

. Que les travailleurs de moins de 25 ans ne sont plus embauchés que dans le cadre de contrats mensuels à temps partiel. Ils travaillent 4 heures par jour pour un salaire de 180 euros par mois, ce qui correspond à un salaire de 7,20 euros par jour, soit un taux horaire de 1,72 euro. La loi impose un salaire mensuel brut minimum de 480 euros pour un plein temps pour les moins de 25 ans.

Le blog KeepTalkingGreece avait alors synthétisé la situation de la façon suivante :

Il est dérangeant qu’alors qu’en 2011 et 2012, les Grecs avaient fait un pas en arrière vers une société à la Dickens, en 2013 et 2014, ils ont effectué un grand bond en arrière, vers le Moyen Age ».

Source : Express

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22 novembre 2014 6 22 /11 /novembre /2014 06:02
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20 novembre 2014 4 20 /11 /novembre /2014 20:07

manifestation athenesSi les États membres de l’Union européenne continuent d’appliquer les politiques d’austérité, il pourrait y avoir entre quinze et vingt-cinq millions de nouveaux pauvres. Un nombre équivalent à celui des citoyens européens vivant actuellement aux Pays-Bas ou en Autriche… Cette inflation de la misère ferait grimper le nombre de pauvres à quelque 146 millions, soit plus du quart de la population européenne.

C’est l’avertissement lancé par Oxfam, confédération d’ONG luttant contre la pauvreté et l’injustice dans le monde, dans son rapport intitulé : « le piège de l’austérité – l’Europe s’enlise dans les inégalités  ». Lequel conclut que les politiques d’austérité menées par les États membres pour surmonter la crise de la dette souveraine et accéder aux programmes de sauvetage n’ont réussi ni à réduire le coût de la dette, ni à favoriser la croissance.

« En Afrique, en Asie et en Amérique latine, certains pays ont mis vingt ans pour revenir aux niveaux d’avant la crise. En Europe, ces politiques minent de façon irréversible les caractéristiques du modèle économique et social européen tel qu’il s’est développé au cours du XXème siècle. Notre analyse indique que les effets de ces politiques empêchent les plus pauvres de se ressaisir, y compris lorsque la croissance sera de retour en Europe », explique Maurizia Iacchino, présidente d’Oxfam Italie.

Le rapport d’Oxfam souligne que les mesures d’austérité favorisent la concentration des richesses aux mains des 10 % les plus riches, alors que les inégalités ne cessent de se creuser dans les pays qui les ont adoptées. De même, sans l’adoption urgente de mesures de relance de la croissance, sans investissement dans les services essentiels, sans lutte contre l’évasion et la fraude fiscales, l’écart entre les riches et les pauvres au Royaume-Uni ou en Espagne pourrait dans les dix prochaines années devenir similaire à celui du Soudan du sud ou du Paraguay.

Il est intéressant de constater que certaines institutions internationales traditionnellement engagées en faveur de politiques d’austérité commencent à revoir leur copie. Le FMI s’est dernièrement livré à une étude de l’impact des politiques dites de consolidation budgétaire, et son rapport est sans ambiguïté : l’austérité réduit plus fortement que prévu l’activité économique et donc les rentrées fiscales, provoquant un creusement des déficits. Ce point de vue est également partagé par d’éminents économistes tels que le professeur Joseph Stiglitz, prix Nobel d’économie en 2001. Pour lui, « la raison pour laquelle l’austérité est particulièrement mauvaise, c’est le problème sous-jacent du manque total de demande. Lorsqu’il y a austérité, la demande chute. Et quand la demande chute, la croissance recule et le chômage augmente. Lorsque le chômage augmente, les salaires baissent en raison de la compétition pour les emplois, et les services sociaux sont réduits. Tous les aspects de l’inégalité sont donc exacerbés  ». CQFD.

Le rapport d’Oxfam est accompagné d’une étude de cas, pays par pays. L’étude pour la France montre que les politiques d’austérité y ont un impact sur les niveaux de pauvreté et d’inégalité. Le pouvoir d’achat a diminué d’1,2 % en 2012 (la plus forte baisse depuis 1984), tandis que dans le même temps, les coûts de l’électricité, du gaz ou du pétrole augmentaient. La dette publique a crû de 3 % depuis 2011, creusant encore le déficit budgétaire. Si l’on fixe le seuil de pauvreté à 60 % du niveau de vie médian, 7,8 millions de personnes (soit 13 % de la population totale) étaient considérées en 2006 comme pauvres en France. En 2010, ce chiffre est passé à 8,6 millions (14 % de la population), dont 2,7 millions d’enfants. Cela représente une augmentation de près de 800.000 pauvres en moins de cinq ans…

Cette augmentation de la pauvreté a particulièrement touché les familles monoparentales, les retraités, les femmes et les jeunes de moins de 18 ans, parmi lesquels le taux de pauvreté a atteint 19,6 %. Entre 2009 et 2010, les salaires au sein des 20 % des personnes les plus pauvres ont diminué de 1,3 %, alors qu’ils ont augmenté de 0,9 % pour les 20 % les plus riches.

Entre 2000 et 2010, le revenu moyen des ménages faisant partie des 10 % les plus pauvres a augmenté de 5,3 % (soit 400 €), alors que celui faisant partie des 10 % les plus riches a augmenté de 18,9 % (soit 8.950 €). En 2010, la partie la plus pauvre de la société a gagné sept fois moins que la partie la plus riche, contre 6,3 fois en 2000.

Au sommet de la pyramide des revenus, ceux issus des placements financiers représentent une part importante des ressources. Si certains se plaignent des effets de la crise, la fortune des super-riches a connu la plus grande augmentation au cours de la période 2004-2010. Les 10 % les plus riches ont augmenté leurs revenus de près de 7 %. Quant au cercle hyper restreint des 0,01 % les plus riches, il a vu sa fortune croître de 32,3 % !

Plus que jamais, l’État représentatif moderne est l’instrument de l’exploitation du peuple par le Capital. Dans la république dite démocratique, la richesse exerce son pouvoir d’une façon indirecte mais d’autant plus sûre, à savoir l’alliance entre le gouvernement et l’argent. Aujourd’hui, dans les régimes que nous connaissons en Occident, la domination des banques a développé jusqu’à en faire un art peu commun les moyens de défendre et de mettre en œuvre la toute-puissance de la richesse. La république démocratique est alors la meilleure forme politique possible du capitalisme ; le Capital, après s’en être emparé, assoit son pouvoir si solidement, si sûrement, que celui-ci ne peut être ébranlé par aucun changement de personnes, d’institutions ou de partis.

Dans le contexte, le vote, par son inutilité, ne devrait pas apparaître comme un enjeu central, les représentants élus ne représentant qu’eux-mêmes et leurs intérêts de classe. Alors que 2014 sera marquée par les élections municipales et européennes, il semble indispensable de réfléchir aux limites de la « démocratie » dans sa forme actuelle… et aux moyens d’abattre le système qui s’en prévaut.

Source : Agoravox

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